Le Metal et les Jeux Vidéo, c’est en quelque sorte une grande histoire d’amour ratée. Bien sûr, vous allez me sortir tout un tas de références, à commencer par Brutal Legend, la plus grande déclaration d’amour au Metal que le jeu vidéo pouvait enfanter. Les plus vieux se souviennent de Rock ‘n Roll Racing, d’autres ont passé quelques heures acharnées à tenter de maîtriser les épouvantables solos de Raining Blood sur Guitar Hero 3 en mode expert. Mais la référence ultime, bien entendu, reste Doom. Sauf qu’en 1993, les capacités sonores de la plupart des PC étaient encore très limitées. Malgré tous les efforts (et le plagiat parfois) effectué par Robert PRINCE, on était encore loin de la qualité de vrais riffs de guitares saturées. En 2016, le reboot de Doom tentait de revoir tout ceci en profondeur avec un certain succès. Le Metal Industriel quelque peu générique que le jeu nous propose rate cependant le coche. Des riffs de guitare saturée, nous en avions à foison. Des mélodies nerveuses et accrocheuses, en revanche, nous les cherchons encore.
Valfaris du studio Steel Mantis surfe sur cette vague, en repassant le tout en 2D. De FPS à Run & Gun il n’y a, après tout, qu’une dimension de différence. Malheureusement, Curt Victor BRYANT (ancien bassiste de CELTIC FROST) n’est ici guère plus pertinent que ne l’était Mick GORDON (1) en 2016. Quelques passages en particulier, comme cet infernal essaim, nous épuisent sur un plan musical, à coup d’accords saturés sans fin qui ne mènent nulle part. Un thème de sous-boss se permet cependant quelques fulgurances. Le tout s’annule généralement dans une soupe peu savoureuse.
Sur la question des visuels, en revanche, Valfaris ne fait pas dans la demi-mesure. Eloge à Metal Hurlant et à Hans Ruedi GIGER dans un déluge de couleurs criardes et de pixels carrés. On pense à la BD Requiem ainsi qu’aux pochettes de VEKTOR. Valfaris ne nous ménage pas les rétines et dégueule de bonnes intentions. Mention particulière aux boss, particulièrement soignés, avec lesquels on passe d’heureux moments. Il faut, bien entendu, apprécier le style « pochette de Death Metal ». Quelque part entre la Dark Fantasy et le Space Opera dégueulasse, Valfaris s’installe copieusement dans ce hors champs qui n’a été que trop peu parcouru. S’il y a un point sur lequel le jeu réussi son coup, c’est là. Encore faut-il faire partie de la niche sensible à cet univers violent et marqué.
Reste le jeu en lui-même. Les sensations sont bien présentes. Les ennemis sont bien fichus, avec une variété certaine et quelques coups de maîtres en la matière. Le tout est assez difficile dans son ensemble, un vrai « Die and Retry » comme à la bonne époque. Notre arsenal est varié (une amélioration notable depuis Slain: Back From Hell, rejeton précédent du studio) et le jeu sait nous imposer quelques passages qui nous refont considérer les forces et faiblesses de l’ensemble. En outre, il est possible d’améliorer son matériel, en particulier via des ressources à économiser en évitant d'activer les checkpoints. Une subtilité à la Shovel Knight qui entraine fatalement un côté répétitif sur les passages les moins corsés du jeu.
On regrette aussi quelques légers soucis d’ergonomie. Therion, Prince héritier de Valfaris en quête de revanche contre son père Vroll, ne sait tirer que dans 8 directions, ce qui semble anachronique. Un bouclier est disponible sur la gâchette LT, lequel nous autorise une intéressante fenêtre de contrattaque s’il est activé juste avant un impact. Cette technique s’avère indispensable dans les derniers niveaux du jeu. Input lag ? manque de précision ? fenêtre trop courte ? on ne sait dire ce qui cloche avec cette option mais sa maîtrise tient plus de l’anticipation que du réflexe. On vous invite donc à changer la configuration par défaut dès le début, et positionner cette option sur le bouton LB avant de prendre de mauvaises habitudes avec la gachette moins précise pour ce genre de manipulation. Enfin, la traditionnelle descente de plateforme, que l’on opère en combinant la croix directionnelle vers le bas avec le saut, semble également récalcitrante. Les diagonales ne sont pas permises ici. Aucun de ces défauts, que l’on a croisé maintes fois dans les années 90 sans même y faire attention, ne nous fait condamner le jeu. Leur accumulation finit cependant par crisper le joueur comme autant de fausses notes dans une partition par ailleurs très classique.
Fort d’une multitudes de références au Metal (Passez la console en anglais pour être sûrs de ne rien rater, en particulier du côté des succès/trophées) et à la Pop Culture, Valfaris peine cependant à se distinguer dans la masse. Dans le genre, on lui préfère Super Time Force et sa mécanique de voyage dans le temps ou le bas du front Broforce, bien bourrin et bien fun à plusieurs.
(1) Un spécialiste de musique de reboots ? Si vous avez l’impression d’entendre toujours la même chose dans les vieux FPS remis au gout du jour, c’est normal. Mick GORDON a donc composé le smusiques de Killer Instinct version 2013, Doom version 2016, les récents épisodes de Wolfenstein de même que l’excellent Prey version 2017.