On aurait tort de croire qu’un bon jeu course sur Super Nintendo se devait d’utiliser le mode 7. Sachez même que certains jeux proposant une vue arrière n’utilisent pas la fameuse projection qui a fait les beaux jours de Super Mario Kart ou F-Zero. Avant l’avènement de Street Racer fin Novembre 94, il y a même eu un autre concurrent de poids avec Rock ‘n Roll Racing. Cette suite non officielle de Radical Psycho Machine Racing (ou RPM Racing) voyait Blizzard Entertainment, alors encore baptisé Silicon and Synapse, se faire un nom.
Car il fut un temps où le jeu de course ne proposait pas toujours une vue intérieure ou à l’arrière du véhicule. RC Pro AM ou Off Road sont des jeux qui firent date en leur temps, pour leur capacité à proposer des jeux de courses avec caméra en traveling ou fixe. On parle pour ces jeux de 3D isométrique, par opposition à une vue de ¾. L’essentiel est que l’angle de la caméra ne suivait pas nos véhicules.
Rock ‘n Roll Racing, donc, est à la fois le meilleur du genre et sans doute l’un des derniers (citons Micro Machine V3 et ses dérivés qui tiennent le flambeau depuis). On y perdait beaucoup en impression, en visibilité et même en richesse des tracés. On ne vous persuadera pas ici que le jeu de course 2D a ses propres qualités qui ont été ainsi perdues dans les couloirs du temps. On pourrait louer la capacité de Rock ‘n Roll Racing à concentrer son action sur des tracés courts, mais bien des jeux en 3D ont depuis réussi à résoudre ce problème.
Pourtant, rien n’y fait. Dès qu’on lance une partie, impossible de lâcher la manette. Pour peu que l’on se fasse à ces contrôles d’un autre temps, le rythme endiablé de ces courses futuristes à quelque chose de fascinant. Ce, malgré les faiblesses de l’animation ou l’impression étrange que l’on a d’aller plus vite lorsque notre véhicule se déplace de manière latérale et non dans la profondeur du champ. A deux, c’est encore mieux, enfin c’était. Obligatoirement nous avons relancé le jeu pour raviver nous souvenirs. On retrouve vite nos réflexes, en particulier ces occasions jubilatoires que l’on a de laisser un concurrent dont le moteur fume nous dépasser pour le pulvériser à coups de missiles dans la seconde.
Plus que la course, c’est la stratégie monétaire du jeu qui fonctionne. Avec le nombre de parties, on a fini par apprendre le coût des véhicules par cœur. Doit-on économiser pour acheter ce nouveau véhicule qui rend inutile toute mis à jour des pneus, ou faut-il plutôt augmenter le nombre de mines afin d’avoir une chance de décrocher un bonus en cas de défaite d’un concurrent ?
Alors on parcourt les planètes, les courses et les classes. Tout s’enchaîne tellement vite, et cette bande son furieuse vient nous réclamer à chaque fois d’effectuer quelques tours de piste supplémentaires. Larry le commentateur se répète un peu. Notre niveau d’anglais aujourd’hui nous permet enfin de comprendre son charabia. Mais s’il est un peu lassant à la longue, les informations qu’il dispense sont néanmoins utiles.
Mais s’il y a un point sur lequel Rock ‘n Roll Racing a fait couler de l’encre c’est sa bande son. Quelques titres seulement nous étaient proposés, des classiques du Rock, Hard Rock et Metal moulinés au filtre synthétique à base de sample de la Super Nintendo. Le résultat est plus qu’honnête compte tenu des contraintes techniques, mais prête à sourire aujourd’hui. Avouons que les 5 thèmes (1) mettent tous dans le mile. La version Mega Drive, faute de samples, nous proposait un sixième titre avec Radar Love de GOLDEN EARRING. Bien évidemment, tout cela affecte les oreilles des plus aguerris. Tous les vieux vous conseilleront la version à laquelle ils ont joué, tous les jeunes y trouveront systématiquement à redire.
Soyons clairs, il n’y a rien de plus rétro que Rock ‘n Roll Racing. Tout y est kitch et assumé. On y a rejoué avec nostalgie, on est parvenu – de nouveau - au bout avec plaisir. On a cependant beaucoup pesté contre ces flaques d’huiles et ces sauts nécessitant de rester dans l’axe de la piste. Car il ne suffit pas d’amadouer les contrôles ici, ou d’avoir l’avantage technologique du véhicule, il vous faut également faire preuve de précision pour éviter les multiples pièges. Car avec ses virages systématiquement en angle droit, Rock ‘n Roll Racing devait abuser de subterfuges pour proposer une courbe de progression intéressante. Ce qu’il réussi finalement avec brio.
(1) "Highway Star" de DEEP PURPLE, "Paranoid" de BLACK SABBATH, "Bad to the Bone" de George THOROGOUND and the DESTROYERS, le thème de "Peter Gunn" par Henri MANCINI et enfin "Born to be Wild" de STEPPENWOLF