Resident Evil 6 est un jeu nerveux, sa réalisation vieillit plutôt bien, on en prend plein les yeux et il ne souffre pas de bugs intempestifs. Mais ce n’est pas un Survival Horror. Voilà pourquoi, au grand étonnement de Capcom, tout le monde crache sur Resident Evil 6. Nous serions nous trompés ? Resident Evil 6 ne possède-t-il pas toutes les qualités requises pour être un excellent jeu ? Oui et non.
Sur le papier, le jeu est démesurément ambitieux. A l’évidence, on a tenté ici de faire plaisir à tout le monde. Pour les fans des anciens jeux, Leon fait son grand retour dans une aventure qui oscille entre grande bâtisse, milieu urbain, égouts, cavernes et autres églises désaffectées. Le tout est parsemé de zombis, les vrais, comme à la bonne époque. Pour ceux qui ont aimé la tournure action de l’épisode précédent, Chris Redfield reprend également du service, cette fois-ci accompagné d’une cohorte de soldats sous ses ordres. Ça flingue à tout va et l’action ne faiblit jamais. Peut-être préférez vous le troisième épisode et son Nemesis qui mettait une pression constante sur le joueur. Rendez vous du côté de Jake et Sherry qui auront fort à faire avec Ustanak, un gros pas beau dont nos deux tourtereaux auront du mal à se défaire. Enfin, pour ceux qui préfèrent les aventures solitaires jonchées d’énigmes, Ada est là pour vous ravir dans un ultime scénario à débloquer, qui n’a rien à envier aux trois autres.
Alors, pourquoi se plaint-on ? Resident Evil 6 en fait trop. A vouloir étaler la sauce dans toutes les directions, le jeu ne plait finalement à personne. Soyons honnête, on a tous pris du plaisir sur ce jeu. Pas tout le temps, pas avec les mêmes personnages, mais il y a forcément un passage qui nous a pris à la gorge. On se souvient avec panique des ombres des zombis arrivant droit sur nous dans les égouts de New York, de ce serpent invisible que l’on doit débusquer tel le Predator, de cette maison luxueuse dans les bas-fonds de Hong Kong, ou de la façon dont le scénario finit par avoir un semblant de sens lorsque la partie avec Ada nous en clarifie les ficelles les plus grossières. Mais tout ceci est accompagné d’autres séquences, nettement moins réussies, qui gâchent le plaisir à chaque fois que l’on semble se réconcilier avec Resident Evil 6. Le fond du gouffre est atteint avec Jake et Sherry, lorsque l’on doit s’orienter bon gré mal gré de nuit en pleine tempête de neige sous les assauts répétés de snipers impossibles à débusquer. Le passage en motoneige qui suit ne relevant certainement pas le niveau.
Pour ceux qui ont tout de même relevé le défi, impossible de ne pas dédaigner au final, le spectacle navrant de la surenchère qui nous est constamment infligé. Remettons les pendules à l’heure, aucun Resident Evil, pas même Code Veronica qui fait plus d’efforts que les autres, n’a brillé de par son scénario, ses dialogues ou ses personnages. Toute tentative de conversion en film, que ce soit avec Milla Jovovich ou en images de synthèse, s’est soldée par d’infects nanards (1). Si l’on ne devait se baser que sur ce critère, tous les épisodes de la série finiraient à la poubelle.
Bien au-delà des dialogues naïfs, des personnages unidimensionnels, et d’un déroulé sans queue ni tête, c’est la surenchère d’explosions et autres cascades improbables qui finit par ulcérer le plus motivé des fans. Plus encore que si l’on avait combiné tout ce que Mickael Bay a fait pour la cause, dans un seul film si garni qu’on en aurait retiré le terme « subtilité » du dictionnaire. Lors de notre dernière partie, les deux personnages sur la même moto sont passés au travers des pales en rotation d’un hélicoptère, lequel les poursuivait depuis plus de 5 minutes tout en leur tirant dessus. Les situations sont tellement improbables et « over the top » qu’on en rit franchement. Resident Evil 6 est la quintessence du nanard.
Alors, nous nous sommes tous trompés. Cet épisode est l’ultime Resident Evil, celui qui atteint de tels niveaux de beauferie qu’il n’était plus possible de surenchérir. Fort heureusement, Capcom a depuis su lire au-delà des chiffres de vente, très correct pour cet épisode si décrié, et a réagi. N’ayant pas terminé le septième épisode pour cause de nausées causées par la réalité virtuelle (et du fait qu’il nous fout les pétoches, avouons), on ne sait dire si celui-ci parvient à rebondir face à la destruction des villes les plus importantes au monde sur lequel cet épisode de la démesure se concluait. En a-t-on encore quelque chose à faire après tout ? Après trois remakes, on ne serait pas surpris que l’univers finisse par connaître un reboot. Resident Evil 6, en attendant, ne peut s’apprécier qu’à partir du 26ème degré. Encore, faut-il pouvoir passer les nombreuses scènes d’action brouillonnes dont il est aussi gavé qu’un canard à la fin Décembre.
(1) Même si, avouons-le, Paul W. S. Anderson oblige (celui de Event Horizon et Mortal Kombat, pas Magnolia), on garde malgré tout une certaine affection pour le tout premier.